Régime juridique des honoraires excessifs des généalogistes
Au moment du décès d’une personne, le notaire chargé du règlement de la succession peut avoir recours à un généalogiste pour rechercher les héritiers qui ne seraient pas directement connus.
Cette hypothèse est fréquente lorsqu’il n’y a pas d’héritier proche et qu’une distance existait entre le défunt et ses successeurs potentiels.
Lorsqu’à la suite de ses travaux, le généalogiste « découvre » les héritier, un contrat de révélation leur est soumis, dont l’acceptation conditionne la révélation de la succession et le transfert du patrimoine.
Sous l’effet de la surprise, de l’émotion et en raison du sentiment de dépendance pouvant exister chez les héritiers par rapport généalogiste, qui détient les clés de la transmission de la succession, ils peuvent être amenés à accepter et à signer ce contrat même lorsqu’il porte des dispositions rémunératoires tout à fait disproportionnées et excessives au regard des prestations accomplies (en pratique, une somme forfaitaire ou un pourcentage de la succession très élevé).
Or, une telle disposition fixant les honoraires du généalogiste n’est pas soumise à une totale liberté contractuelle, et les juridictions contrôlent et au besoin réduisent les honoraires des généalogistes lorsqu’ils sont excessifs, et cela même après que les héritiers aient signé le contrat de révélation énonçant la rémunération.
Une Jurisprudence claire de la Cour de Cassation existe à ce sujet.
Ainsi, par un arrêt en date du 5 mai 1998, la Cour de Cassation a dit qu’il appartenait aux juges du fond d’évaluer si, au regard du service rendu, l’honoraire forfaitaire stipulé par le contrat de révélation au profit du généalogiste n’était pas excessif au regard du service rendu, auquel cas il devait être réduit (C. Cass. Civ. 1 n° 96-14.328 : Bull. civ. I n° 168 p. 112).
Par arrêt en date du 21 février 2006, la Cour de Cassation a estimé qu’il appartenait et était conforme au pouvoir souverain des juges du fond de juger « que les soins, démarches et peines dont ils relevaient l’existence et qui déterminaient nécessairement, par leur nature et l’importance l’étendue du service rendu, justifiaient la réduction de moitié des honoraires réclamés ».
On notera également dans un cas « extrême », sur le fondement cette fois non du pouvoir modérateur du juge sur les honoraires mais sur celui de l’absence de cause du contrat de révélation, le refus des juridictions d’accorder au généalogiste une rémunération lorsque son intervention était inutile.
Dans l’affaire en cause, les héritiers avaient démontré l’existence de relations familiales suivies avec leur grand-oncle décédé et le fait qu’une société gérant un contrat d’assurance vie avait été en mesure de les contacter en tant que bénéficiaires du contrat pour leur régler leurs droits, sans passez par un généalogiste.
Par ailleurs, le notaire chargé de la succession n’avait pas mandaté le généalogiste mais seulement répondu qu’il ne voyait pas d’inconvénient à ce qu’il fasse des recherches, et se trouvait en réalité en mesure de contacter directement les héritiers car il avait reçu de l’établissement de soins, dans lequel le de cujus avait fini sa vie, divers documents l’identifiant…
Il en résultait que les démarches entreprises par le généalogiste étaient inutiles, ce pourquoi ses demandes rémunératoires étaient à juste titre rejetées par les juges du fonds approuvés par la Cour de Cassation (C. Cass. Civ. 1 8 octobre 2008 n° 07-16.044).
En tout état de cause et en conclusion, il convient de retenir que même une fois le contrat de révélation précisant l’honoraire du généalogiste signé, cet honoraire, s’il est excessif, peut être utilement contesté devant les tribunaux.
Ce caractère excessif sera apprécié en fonction de différents critères, dont notamment la complexité de la mission (éloignement des héritiers, présence ou non d’héritiers à l’étranger, nécessité de recherches délicates…), les prestations effectives qu’il aura du accomplir, ou encore le temps passé dans les recherches.
Ainsi, si la somme sollicitée par le généalogiste paraît disproportionnée aux héritiers, une possibilité de négociation des honoraires importante peut leur être ouverte, et le recours aux tribunaux être utilement envisagé.