Un animal peut-il bénéficier d’un testament ?

Un animal peut-il bénéficier d’un testament ?

Nombre de personnes, soucieuses du devenir de leurs animaux de compagnie, s’interrogent sur la possibilité de les gratifier en leur léguant tout ou partie de leur patrimoine.

On pense à l’exemple du célèbre couturier et styliste Karl Lagerfeld, qui affirmait de son vivant que sa chatte « choupette » serait son « héritière ».

La législation française permet-elle une telle dévolution testamentaire ?

Une telle affirmation correspond-elle à la réalité et la législation française permet-elle une telle dévolution testamentaire ?

Il convient en premier lieu de de rappeler qu’en droit français, les animaux de compagnie ne bénéficient pas de la personnalité juridique, nécessaire à la titularité de droits et notamment à l’exercice du droit de propriété.

Ainsi, selon l’article 528 du code civil :

sont meubles par leur nature les animaux et les corps qui peuvent se transporter d’un lieu à un autre, soit qu’ils se meuvent par eux-mêmes, soit qu’ils ne puissent changer de place que par l’effet d’une force étrangère

 

Les animaux restent donc assimilés juridiquement aux meubles, cela malgré l’adoption de la loi modernisant le statut juridique de l’animal, publiée au Journal Officiel le 17 février 2015 et introduisant un nouvel article 515-4 au Code civil, qui dispose que l’animal est « un être vivant doué de sensibilité ».

Jurisprudence constante sur les animaux

En conséquence, depuis les années 1950 et un célèbre arrêt de la Cour d’appel de Lyon en date du 20 octobre 1958 (D. 1959 p. 111, Répertoire de droit civil, avril 2015, n° 31), il est de jurisprudence constante qu’un animal ne saurait devenir le bénéficiaire direct d’une libéralité, qu’il s’agisse d’une donation ou d’un legs transmis par la voie testamentaire.

En revanche il est possible de recourir au legs avec charges afin d’assurer la sérénité et l’avenir de son animal de compagnie.

Par ce type de legs, le défunt instaure une tierce personne légataire de ses biens ou d’une partie de ses biens, tout en obligeant cette dernière à respecter une ou plusieurs obligations en contrepartie, qui peut en l’occurrence consister à apporter à un animal désigné tout le soin et l’entretien nécessaire, suivant des modalités qui pourront être expressément stipulées.

Cette institution du legs avec charges est admise par le Code civil, qui en fixe aussi les limites légitimes.

Ainsi, selon l’article 900-2 du Code civil :

tout gratifié peut demander que soient révisées en justice les conditions et charges grevant les donations ou legs qu’il a reçus, lorsque, par suite d’un changement de circonstances, l’exécution en est devenue pour lui soit extrêmement difficile, soit sérieusement dommageable

 

Ainsi, lorsque la charge grevant le legs devient insupportable matériellement à son bénéficiaire, celui-ci dispose d’un droit à en contester l’étendue.

Solliciter la révocation des biens légués

A l’inverse, si le légataire se soustrait sans motif valable des obligations prévues par le legs avec charges, il s’expose à ce que toute personne intéressée et notamment tout héritier puisse en solliciter la révocation afin que soient réintégrés dans le patrimoine successoral les biens légués.

Concernant la chatte « choupette », elle continue aux dernières nouvelles de vivre des jours paisibles dans un grand confort matériel.

Cela grâce à l’institution d’un legs avec charge, stipulé par Karl Lagerfeld au profit de son ancienne gouvernante et amie.

L’établissement d’un legs avec charge par un testament finement rédigé révélant ici toute son utilité au fil du temps.

Avocat au barreau de Paris, je vis ma profession d’avocat comme un engagement absolu aux côtés de ma clientèle, fait de rigueur, de réactivité et d’appui constant et serein, dans le respect des normes déontologiques.